Genre : Reportage
Thématiques : Économie, agriculture - pêche
Région : Martinique
Titre : Village de la transat : les bénéfices attendus ont pris l'eau
Publication papier : mai 2011
FORT-DE-FRANCE Village de la Transat : les bénéfices attendus ont pris l'eau
Vent trop fort, pluies trop abondantes clients trop rares. Les exposants du village de la transat Bénodet-Martinique sont assez déçus...?
SUR LE VILLAGE DE LA TRANSAT. Le sourire, Pascal et Audrey ne l'ont que pour la photo. Traiteurs au Mans, ils ont fait le déplacement pour participer au village de la transat Bénodet-Martinique. Depuis qu'ils sont installés sur le malécon, ils ont perdu tout enthousiasme. « Si tout continue comme ça, on n'a plus qu'à plier bagages tout de suite, se faire rembourser le billet retour pour rentrer à la nage en Métropole » regrette Pacal. Prix du voyage, de la location du stand et autres frais : le couple comptabilise près de 4000 euros de dépenses. « Je ne pense même pas qu'on pourra faire 2000 euros, la moitié de notre budget » déplore Pascal. Pas de recette pour le moment. Ce matin, le traiteur doit se débarrasser de plusieurs kilos de pains : des sandwichs rassis qu'ils n'ont pas eu l'occasion de vendre. Des mets que le cuisinier avait garnis d'une « salade spéciale », émincée au poulet boucané, et dont il jure que le goût était exceptionnel. « À l'heure actuelle, il faudrait un miracle » conclut le commerçant.
Une intervention divine providentielle ? La marchande du dernier stand ne l'espère plus. « Je suis énervée, je suis énervée » répète-t-elle en rangeant énergiquement les chapeaux et Tee-shirt qu'elle aimerait vendre. « Depuis mercredi, je n'ai rien vendu, rien du tout. Ma tête est pleine, j'en ai marre. » Ses maux de tête sont provoqués par des calculs commerciaux. 1000 euro pour la location d'un stand de 16 m2 ; 780 euros pour 12,5 m2 ; 400 euros pour le comptoir d'un salon et 250 euros pour la moitié de ce même espace.
Pas que la météo
« C'est vraiment difficile, mais nous sommes là, on tient bon » renchérit, à côté, Julie, du stand mode passion. Chaussée de grandes bottes roses à motifs noirs et équipée de ciré plastique, elle classe ses articles. « Quand il pleut, le stand est inondé. On ne nous a pas mis de gouttière ni de bâche. » A proximité d'elle, le stand de Thierry est plus sec mais les conséquences commerciales sont les mêmes : « à cause de cette pluie, dimanche, il y avait du monde mais on a dû fermer à 19 heures au lieu de 22 heures. » Dans l'ensemble, les marchands sont assez déçus. Le bilan prévisionnel qu'ils dressent est « catastrophique » et tout le monde pointe du doigt une unique responsable : dame nature. Les conditions métrologiques ont été exceptionnellement mauvaises. En raison du vent, d'abord, les coursiers sont arrivés en Martinique avec trois jours d'avance. Suite aux intempéries, l'inauguration du village a ensuite été retardée de plus de 24 heures. Résultat : un village commercial qui ouvre bien tardivement avec des chalands qui se font désirer.
Pour certains commerçants, le manque d'argent est aussi en cause. « Nos articles ne sont qu'à dix voire quatre euros. Les gens n'achètent pas parce qu'ils n'ont pas les moyens de le faire, » diagnostique Ingrid, du stand Flora Possy.
Compte tenu de la situation, certains ont décidé d'adopter une nouvelle stratégie. « Maintenant, j'envisage plus ce village comme une opération marketing pour me faire connaître. Parce que j'ai bien compris qu'il ne fallait plus espérer faire de belles recettes » confie Marie Pierre, hôtesse du stand Panier des îles.
Il y en a d'autres, comme Éric, qui se refusent à toute évaluation complètement négative. « On a du tout bon et du tout mauvais » . Pour les aspects positifs, il fait allusion à l'organisation. Habitué aux foires depuis 25 ans, il reste optimiste et adopte une vision à long terme. « Quand c'est dur au début, c'est plus cool à la fin. Il y a des touristes qui descendent ici tous les jours et ce village a du potentiel » assure-t-il. Pour la seconde édition, il pense déjà être présent, avec son stand Bel créole. En attendant, pour cette première, il reste confiant : dame nature lui a dit que le soleil serait au rendez-vous. De quoi esquisser un nouveau sourire sur les visages des deux traiteurs, Pascal et Audrey....
- Les prix prennent aussi le large
« Mais que mettent-ils dans leur punch ? » Après avoir payé 4 euros pour le verre, Marco n'est pas le seul à se poser la question. Planteur et rhum sont au même prix. Au comptoir du bar-restaurant du village, même assoiffés, les clients ne se bousculent pas. « J'ai refusé d'acheter leur bouteille d'eau et je leur ai dit ma façon de penser » raconte Thierry. Il a refusé de débourser 2,50 euros pour 50cl d'eau plate. Les 1,5 l, eux coûtent 5 euros. Tout comme le sandwich aux accras ou au thon-mayonnaise.
Louis est de Normandie et il parcourt le village jusqu'à sa clôture. Venu en bateau, il n'a goûté ni les lambis à 24 euros, ni le loup à 30 euros, encore moins la langouste à 35 euros. « Je ne consomme pas ici, j'achète à l'extérieur » raconte-t-il. Plusieurs des personnes rencontrées ont affirmé adopter le même comportement.